La pauvreté aux Pays-Bas

Récemment propulsés sur le devant de la scène politique européenne, les Pays-Bas, réputés calmes et consensuels ont été le théâtre de nombreuses émeutes. Ainsi, tout ne serait pas rose au pays des Orange ? Nos camarades du mouvement de la jeunesse communiste des Pays-Bas nous révèlent la face sombre du « paradis » libéral (et fiscal). -Traduction d'Antonio Bermudez

En 2011, Mark Rutte, d’ores et déjà Premier ministre, a déclaré qu'il s'opposait à l'utilisation du terme « pauvreté » aux Pays-Bas. Selon lui, cela ne s'appliquait pas, car le « minimum social » aux Pays-Bas est très élevé. Quelle est la part de vérité dans cette affirmation ? Pour répondre à cette question, nous évoquerons les chiffres de la pauvreté aux Pays-Bas.

Les chiffres ne mentent pas. Avant le coronavirus, plus d'un million de Néerlandais vivaient déjà dans la pauvreté, dont plus de 250 000 enfants[1]. Cela soulève bien sûr une question : qu'est-ce que la pauvreté ? Aux Pays-Bas, on se base généralement sur le prix d'un « budget des besoins de base ». Quiconque a un revenu inférieur ou égal à celui-ci est considéré comme pauvre. En 2019, le Bureau Central des Statistiques (CBS) a fixé le seuil de pauvreté à 1080€ nets par mois pour une personne seule[2].

Si les personnes ayant un tel revenu sont pauvres, il est insuffisant de dire que seuls ces gens le sont. Les estimations et les moyennes ne peuvent pas prendre en compte les situations spécifiques des personnes, telles que l'évolution des loyers ou des coûts des soins de santé. Il est important de mentionner qu'une grande partie des personnes vivant dans la pauvreté ont un emploi. Le nombre de chômeurs a fortement augmenté l'année dernière, mais n'explique pas la pauvreté aux Pays-Bas. Le CBS a calculé qu'à la fin de 2019, plus de 320 000 personnes étaient au chômage et qu'un an plus tard, ce nombre était d'environ 380 000. Ces deux chiffres sont bien inférieurs à 1 million.

Il y a aussi beaucoup de gens aux Pays-Bas qui ne sont pas considérés comme pauvres, mais qui restent dans une situation financière désastreuse. Cela concerne principalement les personnes qui n'ont peu ou pas de réserves financières. En 2015, l'Institut national pour l'information budgétaire a calculé que 20% des Néerlandais n'avaient pas du tout d’économies et que 30% avaient une épargne inférieure à 2 000€[3]. C'est inférieur au revenu mensuel net moyen. En d'autres termes, la moitié des Néerlandais ne pourraient compenser la perte de leur emploi plus d'un mois. En 2019, le même institut a calculé qu'environ un tiers de tous les ménages néerlandais avait des arriérés. Un ménage sur cinq rencontre des problèmes de paiement[4].

Nous avons une grande part de pauvreté et de personnes au bord de la pauvreté aux Pays-Bas. C'était déjà le cas avant la crise du coronavirus et cela ne fera qu'augmenter. Les jeunes en particulier sont durement touchés par cette crise. Là où 1/5 des personnes de plus de 18 ans ont subi une baisse de leurs revenus depuis le début de la crise du coronavirus, c'est le cas pour 1/3 des jeunes. Tout cela a lieu alors que l'économie néerlandaise ne semble pas mal se porter. Les marchés financiers atteignent même des niveaux records[5]. Pour les personnes qui croient que le bien-être du Néerlandais moyen est directement lié à la façon dont l'économie se porte, les chiffres de la pauvreté cités ci-dessus peuvent être surprenants. Pour les autres, ce qui précède confirme ce que nous savions déjà : si l'économie se porte bien, les profits iront principalement à la classe capitaliste et en temps de crise, le fardeau pèsera sur la classe ouvrière.

Que devrions-nous penser de la déclaration de Mark Rutte selon laquelle il n'y a en fait pas de pauvreté aux Pays-Bas ? Ce que M. Rutte considère à titre personnel comme de la pauvreté n’a aucune importance. Assez d'adultes et d'enfants doivent aller au travail ou à l'école le ventre vide. Les enfants manquent leurs voyages scolaires ou ne peuvent pas faire de sport avec leurs petits camarades. Les adultes n'ont pas de vie sociale. Ce dernier point garantit également l'invisibilité de la pauvreté aux Pays-Bas. Grandir dans la pauvreté empêche également le cerveau de se développer correctement[6]. Ceux qui ne prêtent pas attention à la pauvreté dans notre pays peuvent être choqués par ces chiffres, mais ils signifient qu'actuellement 1 enfant sur 9 a un risque élevé de lésions cérébrales permanentes, simplement parce qu'il n'a pas « réussi » à naître dans la bonne famille.

Dans l'ensemble, la pauvreté aux Pays-Bas est un problème majeur. L'économie capitaliste n'est pas conçue pour offrir à chacun une vie digne et elle l'a prouvé maintes et maintes fois. La lutte pour mettre fin à la pauvreté à jamais, ici et dans le reste du monde, est la lutte pour le socialisme.

Source : https://www.voorwaarts.net/armoede-in-nederland/