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JRCF

"Polemini, maintenant tu nous écoutes."

En France comme en Italie et comme dans la majorité des pays capitalistes, la gestion de la crise sanitaire a de lourds impacts sur les jeunes générations, notamment sur le milieu universitaire où la crainte et le désarroi gagnent de plus en plus du terrain. Désarroi en France, qui, malheureusement en pousse plus d’un à commettre l’irréparable. La situation en Italie est globalement similaire à celle de notre pays, la plupart des cours sont assurés à distance, mais cela est de moins en moins accepté par les étudiants italiens qui, pour certains, entrent en lutte contre la direction de leurs universités respectives. C’est de ces mobilisations dont traite l’article traduit. Plus précisément, il traite des mobilisations étudiantes de La Sapienza à Rome, dont le FGC (front de la Jeunesse Communiste), l’organisation qui a écrit l’article original, joue un rôle important.

 

"Polemini, maintenant tu nous écoutes."

 

de Tatiana Morellini et Giorgia Semetkova

 

Le mercredi 13 janvier à la Sapienza, une rencontre est prévue à 12 heures entre les porte-parole de la mobilisation universitaire de ce 16 décembre dernier et la nouvelle rectrice Antonella Polimeni.

À cette occasion, les étudiants de la Sapienza ont appelé à une nouvelle manifestation à 11 heures, avec le slogan « Polemini, maintenant tu nous écoutes ! », nouvelle manifestation qui se tiendra en même temps que l'accueil des représentants par la rectrice.

Le rendez-vous a été obtenu grâce à la mobilisation universitaire du 16 décembre dernier, mobilisation en particulier tournée contre le paiement du second versement des frais universitaires imposé malgré la crise, pour la réouverture de tous les espaces inutilisés laissés par l'université, et pour garantir à tous l'accès aux cours et organiser une rentrée en sécurité dès que ce sera possible.

L'événement fait suite à une série de mobilisations et de protestations s'étant tenue ces derniers mois à la Sapienza, comprenant l'occupation symbolique de la lucarne survenue le 26 novembre.

Afin de porter des revendications au plus près des besoins des étudiants, les promoteurs de la mobilisation ont lancé un questionnaire d'enquête sur les conditions dans lesquelles se trouvent les élèves de la Sapienza suite à la pandémie. L'objectif du questionnaire est de relever les problèmes rencontrées par les étudiants, et notamment ceux des classes populaires, ainsi que d'obtenir un tableau statistique utile à la préparation de la rencontre. Après avoir enquêté sur la situation économique des étudiants, notamment sur son éventuelle détérioration suite à la crise sanitaire, l'opinion sur la politique de gestion des frais de scolarité dans la phase de crise économique et sanitaire et sur la question des espaces universitaires, souvent inutilisés ou qui ne sont pas mis à la disposition des étudiants, a été recueillie. En outre, les problèmes rencontrées durant les cours à distance et dans le déroulement des examens, la condition des étudiants non hébergés sur le site, de ceux qui habitent en banlieue, et des étudiants travailleurs sont sondées.

En peu de jours, le questionnaire a obtenu plus de mille deux cents réponses, démontrant ainsi que les étudiants sentent la nécessité impérative de dénoncer les problèmes qu'ils ont dû affronter chaque jour durant cette période - déjà critique en soi - d'urgence sanitaire.

Des résultats du sondage, conduit sur un échantillon d'étudiants plutôt vaste, se dégage un tableau dramatique de l'état actuel de l'université, qui, incapable de garantir une formation adéquate, a également ignoré la détresse vécue par ses propres étudiants et par leurs familles respectives, réclamant malgré tout le paiement des frais universitaires.

Un étudiant en biotechnologie écrit : "Je trouve absurde et inacceptable le fait que des solutions valides pour nous permettre de faire nos heures de laboratoire n'aient pas été conçues. Mon cursus aborde des thématiques très pratiques et de laboratoire, malgré le fait que je sois en deuxième année, je n'ai pas encore eu la possibilité d'accéder à un laboratoire dans les structures de la Sapienza. Je pense que cela nuira à ma formation et à mon parcours d'étude."

Mais les critiques des étudiants ne se limitent pas à la seule période de la pandémie ; une étudiante en génie managérial, par exemple, plaint la carence d’espace destiné aux étudiants, problème qui est latent depuis toujours à la Sapienza. Elle poursuit en écrivant ceci : "De plus, lors de l'année scolaire 2019-2020, il n'y a eu, ni réduction, ni exemption du troisième versement, malgré la pandémie en cours. Pour une étudiante hors site comme moi, qui n'a déjà pas pu bénéficier d'une seule réduction de loyer, payer en plus de cela les frais universitaires en entier, a été injuste. Le monde universitaire a été abandonné."

Parmi les problèmes critiques les plus souvent relevés et rencontrés par les élèves de l'université, les étudiants en lettre, notamment, pointent du doigt la désorganisation des cours, mais aussi le sujet des coûts élevés du matériel nécessaire pour les cours individuels : "Les prix des matériels d'étude sont trop élevés - écrit l'un d'eux - et les bibliothèques universitaires sont inutiles en temps de COVID car elles n'envoient aucun document, pas même au cas où il s'agisse de quelques pages à numériser."

Problèmes aussi pour les étudiants qui risquent de ne pas finir à temps leur parcours universitaire : "Je suis en train de réaliser une thèse de télématique, - écrit une étudiante en génie biomédical - les retards divers en raison du COVID m'ont amenée à choisir l'examen de mai. Ce qui veut dire que pendant deux mois, je ne rentre pas dans l'exemption des frais. Je vais donc devoir payer les 3 versements de frais universitaires pour seulement 2 mois, durant lesquels je continuerai à travailler à la maison avec un pc que j'ai dû acheter moi-même."

"Pendant la rencontre, nous discuterons des frais universitaires, des cours tenus à distance, des espaces universitaires, des services, du droit à l'étude, et de la rentrée en présenciel et en sécurité. Nous le ferons - déclarent les porte-parole des étudiants qui présideront à la rencontre - avec la conscience qu'une rencontre institutionnelle ne suffira pas à résoudre tous nos problèmes, mais qu'en même temps, il est important que les tables de discussion avec l'université ne soient pas monopolisées par les listes clientélistes, qui au profit de leurs représentants, sont prêtes à liquider les intérêts des étudiants."

Les porte-parole de la rencontre à la Sapienza réitèrent: "Les représentants qui participeront à la rencontre seront le mégaphone des luttes et des besoins des étudiants : pour cette raison, en vue de la rencontre avec la rectrice, nous voulons renforcer la participation et la mobilisation étudiante."

Parmi les principaux promoteurs de l'événement, se trouve le Front de la Jeunesse Communiste (Fronte della Gioventù Comunista), dont les responsables dans les organes représentatifs de la Sapienza prendront une part active dans la rencontre avec la rectrice, comme en témoigne Lorenzo Vagni, représentant des étudiants en Assemblée et au Conseil de la Faculté d'ingénierie de l'information, de l'informatique et de la statistique : "Avec les mobilisations de ces derniers mois nous avons voulu lancer un signal clair : nous, étudiants des classes populaires nous n’avons aucune intention d'accepter que la crise économique actuelle soit portée de tout son poids sur nos épaules et sur un système d'instruction déjà affaibli depuis des années par des coupes budgétaires, des privatisations et de la rentabilisation. En ces mois, le gouvernement n'a alloué à l'université que des montants dérisoires, qui ne sont absolument pas en mesure de garantir le droit à l'enseignement supérieur et de répondre aux problèmes structuraux dont notre modèle d'instruction souffre depuis des décennies désormais. Dans le même temps les directions des universités sont de plus en plus éloignées des besoins des étudiants, calquant la gestion de l'université sur celle de l'entreprise. Nous savons que seul à travers la lutte, nous pouvons inverser ce processus et dans cet esprit retenons la journée du 13 janvier comme un pas en avant, au cours duquel certains de nos représentants étudiants rencontreront  la rectrice de l'université La Sapienza et par lequel nous construirons un moment de mobilisation étudiante pour faire entendre notre voix. Ce sera aussi un moment important pour montrer ce qu'est notre modèle de représentation : nous voulons que ce soit les étudiants eux-mêmes qui participent activement à la construction de la rencontre, nous serons les yeux et les oreilles des étudiants des classes populaires. Nous savons que tous les problèmes que nous dénonçons ne sont pas directement imputables à la direction de l'université, c'est pour cette raison que nous nous sommes mobilisés ces derniers mois, chose que nous continuerons à faire également devant le ministère de l'université et de la recherche. Nous invitons par conséquent tous les étudiants à participer à l'enquête que nous avons promue en vue de la rencontre avec la rectrice, et nous vous invitons également à construire ensemble des moments de mobilisation toujours plus efficaces. Ce n'est qu'avec la lutte et la participation massive des étudiants que nous pourrons améliorer notre condition! ".

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