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Le communiste : portrait humain d’un militant révolutionnaire

Le communiste : portrait humain d’un militant révolutionnaire

En pleine période de russophobie généralisée suite à l’intervention russe en Ukraine (que le PRCF, pour rappel, trouve disproportionnée), il semblerait que les éléments de la culture russe, bien qu’éloignés de la personne de Vladimir Poutine, soient partout attaqués, comme le démontrent les récentes annulations de séminaires sur l’œuvre de Dostoïevski. Cette mise à l’index vise - peu importent les intentions qui sont mises en avant - à appliquer une propagande typique de la Première guerre mondiale où l’ennemi n’est plus la politique d’un État en particulier mais un peuple dans son essence – machiavélique -, ici les Russes. L’auteur de ces lignes refusant, tout comme ses camarades, cette propagande belliciste (sans non plus verser dans l’extrême inverse à propos du peuple ukrainien), a très envie de vous parler d’une œuvre du cinéma soviétique, quitte à nager à contre-courant de l’ère ambiante anti-russe et anti-communiste. Ce film c’est Le communiste (1957) de Yuli Raizman, tourné à l’occasion de l’anniversaire de la révolution bolchévique. Celui-ci présente un jeune révolutionnaire ordinaire mais convaincu, dans un style assez classique. Long-métrage culte en URSS, il n’a pas connu de version française sauf erreur de ma part. J’ai pu le regarder grâce à la chaîne YouTube de Mosfilm qui permet d’avoir en accès libre les œuvres de son catalogue, avec des sous-titres français et anglais la plupart du temps.

Le film raconte l’histoire de Vassily Goubanov, un jeune ouvrier engagé par le Parti communiste en 1918, en pleine guerre civile, pour s’occuper du magasin de ravitaillement d’une ville nouvelle socialiste en construction. En faisant face aux oppositions locales et à ses désirs amoureux, Goubanov devra faire preuve de témérité et donner l’exemple à ses concitoyens.

Yuli Raizman (1903-1994) est un cinéaste soviétique très décoré au cours de sa carrière. Il fut diplômé de l’Université d’État de Moscou en 1924 et commença à travailler en tant qu’assistant-réalisateur chez Yakov Protazanov à la société de production Mezhrabpon-Rus. Il devient par la suite réalisateur chez Mosfilm en 1931 avant de basculer en 1948 chez Riga Film studio. Entre autres dans ses réalisations nous avons La dernière nuit (1936), Berlin (documentaire de 1946), Le chevalier à l’étoile d’or et La vie privée (1982).

Le procédé narratif est simple, l’histoire est racontée par un narrateur omniscient comme on en voit beaucoup et qui permet d’expliciter certains évènements. Au cours du film on apprend que le narrateur est en fait le fils du héros et de sa femme Anyuta. C’est donc une histoire transmise par sa mère que celui-ci nous donne. Grâce à lui on peut situer l’action, soit 1918 au tout début de la révolution et de la guerre contre l’Armée blanche.

Le personnage principal Goubanov est un ouvrier militant communiste qui agit dans ses actes en tant que représentant des valeurs du communisme, de son Parti, y compris dans ses faits et gestes les plus simples. Il est une sorte de stakhanoviste toujours prêt à se démener pour servir le bien commun et son idéal. On pourrait même parler d’une sorte de virilité communiste, dans un sens non machiste, car il démontre des qualités de puissance, de courage et d’un sens de l’honneur à toute épreuve. L’une des scènes qui montre le mieux cet aspect du personnage et son stakhanovisme se trouve vers la fin du long-métrage. Lorsqu’il partira chercher le train de marchandise en pleine forêt, il sera énervé de l’inactivité des conducteurs alors que la ville de Zagora risque de mourir de faim. Il se lancera d’abord seul à couper les arbres de la forêt, afin de faire du feu pour les trains, quitte à risquer l’épuisement, juste par devoir pour les autres. Il s’oppose par sa personne et par ses actes aux paysans arriérés du début du film, qui sont croyants et font des pillages - un groupe de personnages représentant l’ancienne société sans principe qu’on retrouvera dans le camp des Blancs en fin de film. Il s’oppose aussi à Fédor, le paysan marié à Anyuta, dans le sens où ce dernier est un matérialiste grossier pensant d’abord à sa propre survie avant celle des autres.

Sa volonté d’exemplarité en tant que communiste peut lui poser des soucis intérieurs, comme lorsqu’il se confie sur ses sentiments pour Anyuta alors qu’elle est une femme mariée.

Cette description du personnage pourrait sembler anecdotique, mais en réalité tout cela à un but très précis : l’identification. L’objectif du réalisateur est que le spectateur s’identifie au héros. En espérant que cette identification pousse le spectateur à agir en conformité avec un idéal humaniste, ici le communisme.

Figure obligée, Lénine est présent dans le film. Son rôle est bienveillant, que ce soit dans les deux scènes où il apparaît en chair et en os, ou par les références tendres des personnages à son égard. Il sert d’étalon de valeur communiste et d’inspiration aux personnages pour changer le monde dans un sens plus humain. Lénine agit aussi comme un deus ex machina en réglant la première difficulté de Goubanov concernant les clous manquant à Zagora. En toute fin, il se désole de perdre des hommes comme Goubanov et souhaite que sa famille soit assurée du nécessaire. Plus généralement, Lénine est très représenté dans le cinéma soviétique : il joue un peu le rôle qu’a Churchill dans les films en Occident.

En guise de conclusion, s’il y a des critiques à faire, ce serait sur le jeu des acteurs, pas toujours très bon. Certains détails du scénario, comme l’introduction de la romance, semblent traités un peu rapidement pour être totalement crédibles. A noter que le film a eu une suite avec le fils de Goubanov et par le même réalisateur nommé Your Contemporary en 1968.

 

Lien vidéo youtube : https://youtu.be/6EvFJCX-Nmc

 

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