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Matrix résurrections ou la conclusion d’une saga

Matrix résurrections ou la conclusion d’une saga

 

La Warner bros obligeant, un dernier épisode de la saga Matrix a vu le jour en décembre dernier. Une démarche déjà fort étrange pour quiconque a vu la saga d’origine, celle-ci étant terminée (et les intrigues clôturées) lors du dernier volet, Matrix revolution. Cela ne pouvait que laisser perplexe l’auteur de ces lignes lorsqu’il est allé le voir au cinéma. L’intrigue de Matrix resurrections nous fait donc retrouver un Néo vieillissant et amnésique dans un ersatz de la matrice, au côté d’une personne ressemblant trait pour trait à Trinity, tandis qu’un groupe de résistants tente de lui faire retrouver la mémoire. Le film n’a jusqu’ici pas obtenu un fort succès en salle et il semble peu probable qu’il y ait une suite. Voyons ce que le film raconte.

La première chose à noter c’est la forte autodérision du film. Ainsi le long-métrage aime à rappeler au spectateur qu’il n’existe que par le harcèlement de la Warner pour que les sœurs Wachowksi fassent un quatrième volet (d’ailleurs seulement l’une des deux réalise le film). La première scène parodie le début du film Matrix où Trinity tente d’échapper aux agents, ce qui est souligné par les personnages, avant d’aller vers le vrai centre de l’histoire. Néo, dans cette version de la Matrix, est l’auteur d’une série de jeux vidéo dont l’histoire reprend celle des trois épisodes de la saga, ce qui fait que tout le monde connaît l’univers de Matrix. Une scène est réservée à mettre à terre ce que tous les spectateurs attendent et les avis qu’ils ont sur la saga : lors d’une réunion d’équipe de création pour faire un quatrième volet au jeu vidéo, les multiples interprétations de la saga (fascisme, queer, libéral, etc) sont moquées, mais aussi les suites sans fond de sagas cultes qui se contentent d’un simple repompage des histoires précédentes.

Un point fort du film selon moi, c’est que ce quatrième opus n’annule pas les précédents épisodes. Pour rappel, l’univers de Matrix se passe dans un monde où les machines sont devenues des êtres intelligents et ont développé une conscience propre. Après une guerre provoquée par l’humanité, les humains ont décidé d’assombrir le ciel pour vider les batteries de leurs ennemis, les machines fonctionnant à l’énergie solaire. A cause de cette nécessité de trouver un autre moyen de subsistance, les machines ont décidé d’utiliser les hommes comme moyen de créer de l’électricité et de pouvoir continuer à survivre. C’est dans ce cadre qu’elles créent la matrice qui asservit les hommes, afin de survivre elles-mêmes en tant qu’espèce. En parallèle, les machines continuent leur guerre contre les humains en-dehors de la matrice. Néo, qui fait partie des humains nés dans la matrice, cherche à libérer les hommes et surtout à mettre fin à la guerre.  En se rendant dans la ville de Sion, dernier territoire des humains, il se rend compte que les humains aussi sont soumis à une hiérarchie et sont aussi peu libres que dans la matrice. Alors que la ville de Sion est menacée d’être détruite sous les assauts de l’ennemi, Néo, qui a réussi à comprendre les machines, leur propose une alliance afin de détruire un ennemi qui prend le contrôle de la matrice et risque de menacer les machines (l’agent Smith), en échange ils abandonnent leur projet de détruire Sion. Et comme Néo réussit à vaincre Smith, la paix entre les hommes et les machines est déclarée. Ce sacrifice n’a pas servi à rien. L’intrigue du quatrième opus se passe en réalité 60 ans après ces évènements et grâce à Néo les humains ont pu développer leur cité, et un confort de vie, avec l’aide de plusieurs machines ralliées à leur cause.

Autre point fort du film, il apporte un regard critique sur la saga. Ainsi, pour rappel Néo défendait l’idée de l’amour, des émotions, de la compréhension, comme forme de libération des différents carcans, et qu’il tentait d’enseigner aussi bien aux humains qu’aux machines. Cette vision très idéaliste est retournée dans le long-métrage. En effet, l’Analyste, le programme qui a remplacé l’Architecte comme concepteur de la nouvelle matrice, utilise justement les émotions humaines pour manipuler les masses. C’est pour cela que la teinte verdâtre a disparu pour des couleurs beaucoup plus claires, plus propre à affecter les êtres humains. L’Analyste joue selon moi le rôle du manager d’entreprise pratiquant le happiness management. Il dit que grâce à lui et à sa méthode, la productivité a doublé. Le fait qu’il laisse conter l’histoire de la matrice au sein de la matrice, montre qu’il comprend que dénoncer les choses par l’art a une certaine limite et n’a pas toujours pour finalité de pousser à la révolte. C’est une autocritique par rapport à la trilogie, qui avait tout de même, malgré ses inconséquences, un message émancipateur, mais qui a totalement été repris et balayé par l’industrie hollywoodienne.

Toutefois, le film ne se démarque pas toujours de sa volonté de faire hommage à la saga d’origine. Par exemple, autant la présence de Néo et Trinity est expliquée alors qu’ils étaient tous les deux morts, autant celle de l’agent Smith ne l’est pas, mis à part la seule volonté de faire un clin d’œil aux fans. Le tout reste une bonne surprise pour une grosse production américaine.

 

Ambroise-JRCF

 

2 Le programme qui avait créé la première matrice et dont la conception de l’organisation du monde (une hiérarchie claire, un monde centré sur la normalité, effaçant les couleurs source d’émotions, etc) correspond à celle du vieux patron capitaliste industriel. A l’inverse, l’Analyste représente plus le capitalisme financier « branché ».

Diriger par le bonheur. Peu traduisible en français, cela signifie utiliser l’aspect ludique du travail, son côté joyeux, pour maximiser la productivité de l’individu.

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