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JRCF

Sur la notion de rouge-brun

Nous partageons avec plaisir l'article de nos camarades du journal militant révolutionnaire L'Indignation sur la notion de rouge-brun. En effet, le PRCF, de même que certaines personnalités comme Frédéric Lordon, François Ruffin ou notre camarade Annie Lacroix-Riz, sont accusés d'être des "rouges-bruns". Bien souvent, et c'est ce que rappelle l'article, cette accusation sert à calomnier toutes personnes voulant combattre le grand capital, l'impérialisme nord-américain (et même français), ou à défendre une souveraineté populaire, comme le faisait auparavant le PCF. 

Nous vous laissons apprécier les arguments de nos camarades sur ce concept fallacieux. 

De quoi rouge-brun est-il le nom ?

 

Mes petits camarades du journal l’Indignation m’ont demandé de faire ce petit article sur le concept de « rouge-brun », une accusation dont ils ont été taxés à cause de l’article sur les positions de certains cadres de l’UNEF1. Avant de faire un tel procès, il faudrait déjà donner une définition claire de « rouge-brun » à même de nous éclairer dans la qualification de telle ou telle position militante.

En cherchant un peu, voilà une définition assez simple et compréhensible par tout le monde qui pourrait nous éclairer un peu :

Le terme rouge-brun désigne une personne, ou une mouvance politique, susceptible de prôner des valeurs hybrides résultant d’un mélange entre celles de l’extrême-droite nationaliste (le brun) et l’extrême-gauche communiste (le rouge)2.

Dans l’histoire, il existe de nombreux exemples de militants de gauche passer à l’extrême-droite. On peut citer Mussolini qui débuta sa carrière politique dans les rangs des socialistes italiens et qui, après la Première guerre mondiale, créera le Parti fascisteet formalisera l’idéologie qui l’accompagne. Nous pouvons aussi citer Doriot, ancien militant communiste voyant sa progression au sein du Parti bloquée, créera le PPFParti Populaire Français, plus grand parti collaborationniste appelant à la « croisade contre le bolchévisme ». Seulement entre Doriot et Mussolini, le moins que l’on puisse dire est que toute trace de rouge avait totalement disparu. On pourrait d’ailleurs trouver des exemples de personnalités politiques ayant fait le chemin inverse, par exemple François Mitterrand qui a quand même commencé sa carrière politique à l’Action française avant de finir au Parti socialiste. Il existe aujourd’hui des parcours analogues, mais le moins que l’on puisse dire c’est que le procès en « rouge-brunisme » dépasse largement ces quelques changements d’orientation politique. Lorsqu’il n’est pas possible de discréditer une idée, on discrédite son porteur. Notre époque fourni chaque jour de nouveaux exemples. Sur le blog de Mediapart, on peut lire un réflexion éclairante  :

Variante d’une vieille antienne, celle des « extrêmes qui se rejoignent », visant à valider la parole centriste comme la seule raisonnable, la théorie du « rouge-brun » fait partie du corpus idéologique de la rédaction de plusieurs médias « de gauche », tels que Libération ou Mediapart. Mais loin de conduire à la classification politique rigoureuse d’une réalité, ce concept vise souvent à stigmatiser la parole dissidente, en généralisant à partir de cas particuliers et en recherchant des liens entre différents réseaux selon une méthodologie hasardeuse et complotiste.3

L’accusation de rouge-brunisme est aujourd’hui devenue une banalité, mais elle couvre systématiquement d’opprobre l’accusé, elle le met directement au ban de la société et empêche la réflexion politique sur de nombreux sujets. Cette accusation assénée en dehors de toute rationalité et de toute réalité concrète est particulièrement présente dans la bouche de militants sois-disant d’extrême-gauche, pour cacher leur conversion coupable aux intérêts du grand capital ou de l’impérialisme nord-américain ! En effet, en grattant bien ce concept, on s’aperçoit qu’il sert à distiller la confusion dans les milieux militants en s’appliquant aussi bien à des personnalités d’extrême-droite comme Alain Soral qu’à des militants communistes comme l’historienne Annie Lacroix-Riz4 , qui ne cesse de mettre dénoncer dans ces ouvrages, sources à l’appui, les liens entre les élites économiques et politiques françaises et du Reich durant la collaboration.

En recherchant justement sur les sites de cette mouvance, je suis tombé sur une petiteFiche technique : « comment reconnaître un rouge-brun »5. On y apprend qu’il serait « brun » de défendre la souveraineté ou de défendre le pouvoir du peuples contre des élites dirigeantes plus que corrompues et soumises aux intérêts de la finance mondialisée :

  • Le souverainisme (battre la monnaie, souveraineté nationale à tous les étages)
  • Le populisme (le peuple c’est le bien, les dirigeants, c’est le mal, le pouvoir au peuple, etc.)
  • La haine de l’Europe, mère de tous les maux : c’est un point qui réunit tous les Bruns, permet de faire un pont entre les tendances. Tout va mal à cause de l’Europe, et si l’on sort de l’Union, comme de l’euro, tout ira mieux (cf souveraineté, identitaire, complotisme).

Alliez ça à la dénonciation de la mondialisation, du libéralisme et à la défenses des travailleurs et c’est bon : vous êtes un rouge-brun. S’il est donc « brun » de défendre le souveraineté des peuples, des nations et des Etats vis-à-vis des puissances de l’argent et d’organisations supranationales antidémocratiques, il l’est aussi de préférer la démocratie par et pour le peuple (ce qui est sensé en être la définition) à la domination politique des élites. Les assimiler au négationnisme, au complot judéo-maçonnique et on en arrive à des amalgames dignes de Je suis partout, mais malheureusement logique dans une période où la théorie est mise de côté, où l’émotion prime sur la réflexion, où on s’attarde plus sur l’image et les petites phrases que sur le fond des problèmes et, par dessus tout, où la recherche de la vérité en partant des faits, des sources est délaissée au profit d’une vision idéaliste et morale.

Après avoir lu cette fiche, il est temps de faire mon auto-critique… Je suis un « rouge-brun ». En effet, je pense être un vrai patriote, je suis prêt à défendre l’héritage de la France qui ne se limite pas à la colonisation. Il y a aussi les Lumières, la Révolution, la déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, la Commune de Paris, la Résistance… Tout cela doit être défendu, de même que la Marseillaise, qui, si elle exhorte au combat, n’a rien d’un chant belliciste et raciste, certains feraient bien de relire les paroles jusqu’au bout… Je dois même ajouter que l’Occident n’est pas seulement celui des croisades et des guerres de rapines. Bien sûr tout cela est historiquement vrai et ses tendances sont encore vivaces dans les sociétés occidentales. Mais c’est aussi le lieu de naissance de la pensée rationnelle qu’il faut défendre et promouvoir dans cette période de retour de l’irrationnel et du fanatisme religieux. Mettre en avant ces concepts est aussi un combat à mener.

De même la défense de la souveraineté n’a pas grand-chose de « brun ». Il ne me semble pas que les nazis étaient les champions de la souveraineté nationale, ils niaient cette souveraineté et allaient jusqu’à remettre en cause le droit à l’existence de tout un panel de nations. Dans ce cadre, il faut se réapproprier le concept de Nation pour la révolution communiste. L’idée est bien justement que la classe ouvrière, que l’ensemble des travailleurs, deviennent La Nation. Cette souveraineté passe par le respect des choix populaires et donc par la remise en cause de notre appartenance à des organisations supranationales qui privent les peuples de leurs droits démocratiques, je pense bien sûr à l’UE, et on pourrait ajouter qui poussent les peuples à la guerre, là aussi je parle bien sûr de l’OTAN. Battre monnaie est une nécessité pour être autonome et indépendant dans ses choix économiques et ne plus dépendre de la volonté des marchés financiers ou d’une Banque Centrale Européenne soumise, avant tout, aux intérêts des banques d’affaires et des fonds de pensions, tout en favorisant en dernier ressort l’Impérialisme allemand. Dans ce contexte on peut saluer le travail d’un François Asselineau ou, dans un autre registre, d’un PRCF qui s’attaquent de front à la construction européenne et à l’OTAN en s’appuyant sur les faits et les textes juridiques et s’évertuent chaque jour à démontrer que cela n’a jamais rien eu d’une belle idée.

Pire, je refuse de défendre le parlementarisme bourgeois, de plus en plus corrompu, contre l’aspiration, à travers les gilets jaunes, à une démocratie émanant directement des citoyens. Nous savons tous aujourd’hui que la démocratie représentative sert les intérêts des puissants et non ceux des travailleurs, sans parler du fait que de nombreuses études montrent une corrélation quasi parfaite entre le temps d’antenne dans les médias et les résultats électoraux. C’est pour cette raison que quelqu’un comme Etienne Chouard apporte avec le RIC une contribution salutaire à laquelle je suis tout à fait favorable. Si je pense bien sûr qu’il n’y a pas que les aspects politiques et juridiques mais que l’économie est tout aussi essentielle, il faut avouer c’est un bon début et que cela répond à l’aspiration du peuple à devenir maître de son destin.

Défendre l’indépendance de notre nation, de notre peuple, défendre une démocratie populaire faite par et pour l’ensemble des citoyens, promouvoir les conceptions matérialistes et toujours rechercher la vérité, combattre les puissances de l’argent et l’impérialisme c’est bien être « rouge ». Pour tout cela le qualificatif de « brun » est de trop. Il ne sert qu’aux idiots utiles d’un extrême-centre, de plus en plus autoritaire et fascisant, pour discréditer les idées et les élans révolutionnaires d’une part grandissante de la population qui refuse de continuer à vivre dans un système social et économique favorisant sans cesse les ultra-riches au détriment de l’immense majorité des travailleurs et de la planète.

1Propos tenus par une dirigeante de l’UNEF où elle « s’en balek » de Notre Dame, ou qui veut « gazer tous les blancs » : https://lindignation.home.blog/2019/04/20/unef-la-haine-des-blancs-na-rien-a-faire-dans-les-organisations-progressistes/?fbclid=IwAR2hEE0DkkKXMyfQjO08eadtGz4_6IO3_aqtuHCHo1prv5l8wU2l3XIoeAo. Cette bêtise crasse se passe de commentaire et je suis bien content d’avoir fini mes études il y a plusieurs années, période ou ces positionnements n’avaient pas cours.

 

2Wikipedia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Rouge-brun. Oui je sais, ce n’est pas le mieux mais elle est plutôt bien écrite, en tous cas je n’aurais pas fait mieux. Je conseille d’ailleurs de lire l’article en toutalité.

 

3Blog Mediapart : https://blogs.mediapart.fr/xipetotec/blog/240414/national-bolchevisme-rouge-brun-historique-dun-concept. Je vous conseille d’aller lire l’article complet qui permet de donner plus de détails sur l’utilisation de cet amalgame douteux.

 

4Voir la vidéo de la Librairie Tropique, une librairie militante parisienne : https://www.youtube.com/watch?v=VAIzj-onpkU. Cet interview est un peu long mais cela vaut vraiment le coup de le regarder en entier. On y apprend justement les raisons des accusations lancées contre Annie Lacroix-Riz par le service de formation de la CGT.

 

5http://www.socialisme-libertaire.fr/2014/10/fiche-technique-comment-reconnaitre-un-rouge-brun.html. Je vous conseille aussi de lire cet article en entier. Le contenu en est édifiant et donne bien la pensée de nos chers gauchistes. Lénine avait raison de qualifier le gauchisme comme une « maladie infantile »…

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